Quand l’hiver prend des airs de printemps…
Après un Noël printanier, les mois de janvier et février n’ont guère vu chuter le mercure. Résultat : les oiseaux gazouillent, les terrasses des cafés font le plein et notre moral est au beau fixe. Mais le bonheur des uns ferait-il le malheur des autres ? Les professionnels agricoles, eux, voient d’un mauvais œil cette météo printanière qui perdure en pleine saison hivernale…
Car, face à cette douceur exceptionnelle, Dame Nature a oublié de prendre ses quartiers d’hiver. Les plantes fleurissent, les arbres fruitiers bourgeonnent… Les végétaux se croient au printemps. Et le vignoble n’échappe pas, lui non plus, aux conséquences de la hausse des normales saisonnières. Certes, le travail de la vigne se révèle plus agréable par temps doux, les vignerons pouvant procéder à la taille d’hiver, opération délicate et laborieuse, dans un relatif confort. Mais ce « dérèglement » climatique peut avoir un impact plus ou moins néfaste sur les terres viticoles.
La période hivernale, longue et froide, est l’occasion pour la vigne de se mettre au repos. Ce repos végétatif, ou dormance, est salutaire pour permettre aux raisins de parvenir, ensuite, à maturité. Un hiver trop chaud pourrait perturber le cycle végétatif de la vigne et avancer la phase des pleurs et du débourrement. De plus, le froid a pour autre vertu d’empêcher champignons et insectes ravageurs de proliférer au retour des beaux jours. Des températures trop élevées en hiver pourraient, à l’inverse, favoriser la multiplication des parasites. Enfin, les vignerons craignent, sous l’effet d’une météo (trop) clémente, l’éclosion prématurée des bourgeons qui pourrait être fatale en cas de gelée tardive.
Autant de risques que les viticulteurs cherchent à éviter à tout prix… et avec lesquels ils doivent apprendre à composer car cette douceur climatique ne devrait plus rien à avoir d’exceptionnel dans les années à venir. À Bordeaux, la filière viticole a déjà commencé à adapter ses pratiques face aux évolutions climatologiques. Au cours de la dernière décennie, plusieurs travaux d’études et de recherche ont vu le jour pour accompagner ce changement et envisager de nouvelles pistes, de la sélection de clones plus tardifs ou moins riches en sucres à l’adaptation à la sécheresse des porte-greffes.
Des solutions existent pour permettre de trouver un équilibre entre la vigne et son nouvel environnement climatique et l’ensemble des acteurs de la filière des vins de Bordeaux s’engage à relever un tel défi. Qu’on se le dise, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige, la viticulture bordelaise a encore de beaux jours devant elle…