Le gel de printemps, un ennemi redoutable pour la vigne
Car en cette période de renouveau, à l’heure où la vigne reprend doucement vie et que les premiers bourgeons pointent le bout de leur nez, le danger est toujours bel et bien présent. Plus encore que les traditionnelles gelées d’hiver, le gel printanier représente un véritable fléau pour la vigne en devenir. Après la taille hivernale, les bourgeons en pleine éclosion sont plus que jamais sensibles aux dégâts du givre. Riches en eau, les jeunes feuilles sont, en effet, susceptibles de geler à partir de -2°C. Intervenant en pleine phase de débourrement, les gelées tardives printanières risquent ainsi de compromettre la récolte future. Un véritable défi pour les viticulteurs qui doivent composer avec la nature et les aléas climatiques…
Crédit : GB
Après plusieurs semaines de relative douceur, avec des températures au-dessus des normales de saison, annonçant un printemps prometteur, le mercure a brusquement chuté en ces derniers jours d’avril. Le résultat ne s’est pas fait attendre avec d’importants épisodes de gel frappant une grande partie du vignoble français. À Bordeaux, la nuit du 26 au 27 avril a été particulièrement rude pour l’ensemble des appellations. Dans certaines zones, les températures sont descendues jusqu’à -4°C. Un épisode d’autant plus critique que la vigne, cette année, était en avance d’au moins quinze jours, la météo clémente du début de printemps ayant favorisé le débourrement précoce des bourgeons.
Crédit : Agence Appa
Pour ne pas revivre un autre avril 1991, les viticulteurs, prévenus de la survenue imminente de cette vague de froid, ont mobilisé tous les moyens possibles pour limiter les dommages causés par le gel. Pour combattre le froid et réchauffer l’air, plusieurs techniques de protection ont été mises en place comme l’aspersion qui consiste à arroser d’eau la vigne au moment où le gel se forme afin de créer une enveloppe glacée autour des bourgeons les protégeant ainsi à la manière d’un igloo. Autre technique employée : les bougies et chaufferettes disposées entre les rangs de vigne pour conserver une chaleur suffisante au pied des ceps. Certains viticulteurs, notamment dans le Libournais et dans les Graves, ont recouru aux tours antigel dont l’hélice en fonctionnement permet de rabattre l’air chaud vers les cultures. Même principe recherché avec l’utilisation des hélicoptères qui brassent l’air au-dessus des vignes et ramènent vers le sol l’air plus chaud. S’ils sont efficaces, ces dispositifs représentent, néanmoins, un certain coût et toutes les exploitations ne peuvent s’équiper correctement. Mais c’est sans compter le formidable élan de solidarité qui s’est exprimé ces derniers jours pour aider les viticulteurs à lutter contre les effets dévastateurs du gel. À l’exemple de la Tonnellerie Baron basée en Charente qui a fait parvenir à plusieurs propriétés des chutes de bois destinées à être brûlées pour relever la température ambiante de quelques degrés.
Crédit : Vignes de Moulon © S Tuscq Mounet
Reste que le violent épisode de gel qui vient de se produire est un vrai coup dur pour les vignerons bordelais. Si tous ont en tête qu’un tel danger puisse advenir, sa survenue est toujours difficile à gérer. L’heure est désormais au bilan : comptabiliser le nombre d’hectares impactés, recenser les parcelles épargnées et espérer qu’une nouvelle salve de bourgeons apparaisse pour donner une seconde chance à la future récolte et permettre au millésime 2017 de s’achever mieux qu’il n’a commencé… Aujourd’hui, plus que jamais, nombreux sont les viticulteurs à pouvoir reprendre à leur compte la chanson composée par Nicolas Pons, propriétaire du Domaine de Sentout, vigneron passionné et musicien à ses heures perdues : « ma vigne est folle, elle me rend fou, ma vigne est folle, et j’en suis fou… là je m’affole, je suis à bout, c’est mon idole, malgré tout ».