Repas chez un vigneron : les recettes plaisir de Marc Médeville
À la table d’un vigneron : les bonnes recettes de Marc Médeville
On n’arrive jamais par hasard chez Marc Médeville. « Le GPS ne suffit pas, il faut se faire téléguider », plaisante ce dernier en tendant une chaleureuse poignée de main. C’est ici, à 20 km de Bordeaux, que se cache le vigneron, grand amateur de bonne bouffe. Avec son frère Jean, il est aux manettes d’une dizaine de châteaux bordelais, dont le fameux Château Fayau, proche de Cadillac. Ensemble, ils perpétuent ainsi la signature « Médeville », qui marque le vignoble bordelais depuis près de 200 ans. Retour sur un repas convivial riche en saveurs, pendant lequel Marc nous a partagé ses recettes les plus gourmandes.
Une cuisine généreuse qui met l’eau à la bouche
C’est au Château du Juge que Marc nous reçoit, son lieu d’habitation depuis 15 ans. Une épaisse bâtisse girondine aux allures de château fort, surmontée de créneaux. « Cela fait de l’effet, mais c’est juste pour couper le vent », tempère Marc. Plus loin, quelques poules gambadent à côté des serres de tomates et de salades anarchiques. « Ma femme appelle ça de la pollution visuelle mais moi, j’aime bien les serres, surtout mes tomates. J’en ai planté sept variétés ». À ces mots, l’odeur des légumes qui mijotent déjà dans la marmite happe nos pas vers la cuisine. C’est là que l’on déjeunera, sur la grande table en bois massif, près d’une cheminée qui a dû crépiter il y a peu. « Cela sent le dimanche en famille », se réjouit Mathieu, le photographe.
Ce matin-là, notre hôte s’est levé tôt pour acheter quelques langoustines et légumes au marché du coin — ceux de la serre n’étant pas mûrs. « Regardez comme les langoustines sont transparentes ! C’est un signe de fraîcheur », souligne Marc, entre deux effluves de bouillon. Au menu du jour : palourdes grillées au four « juste agrémentées de chapelure et de persil » pour l’apéro, puis langoustines à l’armoricaine.
Deux recettes qu’il a héritées d’une cheffe hors pair : sa maman. « C’est elle qui m’a donné le plaisir de cuisiner… et de me laisser guider par le nez. La cuisine, c’est comme le vin, c’est un assemblage de saveurs et d’odeurs. C’est aussi un moment de vie que l’on partage ». Et il a raison, Marc : la signature des cuvées de sa région, c’est l’assemblage. Un art auquel il est possible de s’initier grâce à l’atelier de l’École du Vin de Bordeaux, en découvrant et en jonglant avec les cépages (presque !) comme un vrai œnologue. 🍷
Un repas haut en saveurs chez le vigneron
Pour chaque plat, Marc nous révèle le vin issu du domaine qui l’accompagnera. « Pour l’entrée ce sera un vin blanc sec. Ensuite, un rouge un peu fruité. Et avec le fromage, un Cadillac ». La messe est dite. Et pour le dessert ? « Je n’aime pas cuisiner les desserts, car cela laisse peu de place à l’intuition et l’imagination… alors on terminera par un fromage si cela vous va ». Bien sûr que ça nous va.
C’est parti. On trinque à l’apéro avec un verre – estampillé Médeville – de Château Gréteau en blanc sec. « Du pur Sauvignon, avec un côté pique-nique… très bon, très frais ». Alors c’est avec les doigts que se poursuit le repas lorsque les langoustines débarquent. « Le seul défaut de ce plat, c’est que tu ne peux pas séduire la personne en face de toi » s’amuse Marc, dont le tutoiement facile contamine la tablée, un verre de Château Peyreblanque rouge, millésime 2012, à la main. La sauce est délicieuse, « grâce aux carottes ». On se lèche les doigts et les babines.
Le repas s’achève donc sur un plateau de fromages de la région en guise de dessert. « Du chèvre, et deux fromages des Pyrénées, de brebis et de vache ». Le tout accompagné non pas d’un rouge, mais d’un blanc doux, un Cadillac, Château du Juge de 2016. « Ici le terroir est plus argileux, cela donne un vin plus épicé, avec plus de caractère ». Un remarquable et original mariage de saveurs, comme ceux à découvrir lors de l’atelier « Vins et fromages » de l’École du Vin de Bordeaux : une occasion unique d’explorer les savoir-faire cousins des fromages français et vins bordelais, autour des délicieux produits de la fromagerie Deruelle. 🧀
La transmission de valeurs fortes, de génération en génération
Dehors, la pluie se met à tomber. Notre hôte regarde à travers la fenêtre d’un œil las. « Nous autres, vignerons, on est des intermittents du spectacle de la météo. Cette année, il a beaucoup plu… Nos salariés en avaient marre d’être tout le temps en ciré et bottes. Ce ne sont pas des canards. C’est un métier qu’on doit faire avec passion. Mais il faut recommencer le travail chaque année. Appuyer sur le bouton reset, et tenter de jouer la partition de la nature. »
La nature, les Médeville la respectent depuis toujours. Si bien qu’ils se sont lancés dans le bio sur une vingtaine d’hectares en Entre-Deux-Mers et Bordeaux rouge. « Pourtant, on consomme plus de fioul en bio qu’en raisonné, mais on essaie. Tous nos vins sont déjà certifiés Haute Valeur Environnementale » explique Marc, tandis que, dehors, quelques petits lièvres profitent certainement de l’herbe haute pour se balader entre les vignes. « J’attends qu’ils grandissent pour tondre entre les vignes. C’est ça aussi le respect de la biodiversité ».
Il y en a d’autres que Marc attend de voir grandir : ses quatre fils, âgés de 14 à 20 ans. « Je ne sais pas encore ce qu’ils veulent faire plus tard, mais j’ai déjà réussi à leur transmettre la passion de la cuisine… Pour le vin on verra ». Car le vin, chez les Médeville comme dans beaucoup de domaines, est surtout une affaire de famille. « On est la septième génération à faire du vin. Mon père a quitté la société avec un vol de palombes. Il a dit : « au prochain vol de palombes, je m’en vais » et c’est ce qu’il s’est passé », se souvient Marc, une pointe de nostalgie dans la voix, vite balayée par son humour.
« À cause de vous, toutes mes bonnes résolutions sont tombées à l’eau ! J’avais fait le pari de me mettre au régime pour l’été avec les copains », explique-t-il en nous raccompagnant. Bon, nous, on n’a rien perdu. Mais on en a certainement gagné : des kilos, de la convivialité, et une envie folle de passer derrière les fourneaux pour reprendre les recettes du vigneron.
Les recettes de Marc Médeville
Place à présent aux secrets de cuisine de notre vigneron. Et si, comme lui, vous souhaitez devenir incollable sur les astuces de dégustation, de conservation, de service et d’accord du vin, l’atelier « De la vigne à la table » est fait pour vous ! 💡
Entrée : palourdes grillées au four
- Recouvrir les palourdes ouvertes de persil, d’une pointe de beurre, de chapelure et de fromage râpé.
- Laisser griller au four.
- Servir avec un Bordeaux blanc sec, type AOC Bordeaux ou Entre-deux-Mers.
Plat : langoustines à l’armoricaine
- Dans une marmite, faire blanchir des oignons, puis y incorporer des carottes très finement coupées, des tomates et quelques feuilles de laurier. Laisser le tout se concentrer.
- Plonger les langoustines dans la marmite, recouvrir, laisser cuire une petite demi-heure.
- En fin de cuisson, ajouter quelques morceaux de piment et des gouttes d’un vin blanc liquoreux, type Cadillac. Éteindre le feu immédiatement et laisser reposer.
- Servir avec un rouge tannique, type AOC Pessac-Léognan ou Graves.
Bonus #1 : les œufs brouillés façon Médeville
« Les vrais œufs brouillés, c’est un peu de patience, beaucoup d’amour, un bain-marie et de bons œufs ».
- Battre de bons œufs frais.
- Les faire cuire 15 minutes au bain-marie, tout en remuant régulièrement. Veiller à ce que le bol reste stable. La texture des œufs brouillés doit être lisse, crémeuse (« et pas grumeleuse, comme à la poêle »).
- Pour agrémenter, rajouter des pointes d’asperge – ou des champignons précuits – et une pointe de sel en fin de cuisson.
- À servir avec un vin rouge souple, assemblage de Merlot et Cabernet, qui complète l’acidité de l’asperge.
Bonus #2 : piquillos farcis à la brandade de morue
- Cuire au four les piquillos.
- Retirer la peau et les farcir avec de la brandade de morue. Pour la brandade de morue : après l’avoir dessalée, la faire cuire 15 minutes à l’eau bouillante. Puis la réduire en purée avec de l’huile d’olive. Ajouter de l’ail et du persil.
- À servir avec un rouge tannique, type AOC Pessac-Léognan ou Graves, pour souligner le côté épicé du poivron.